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Je suis psychologue

L'accès des personnes intersexuées et de leur famille à un accompagnement psychologique adapté constitue un des piliers de l'activisme intersexe. Fournir un soutien aux personnes intersexuées et à leurs proches est essentiel pour leur permettre de rompre le silence et de faire face à une société et un secteur médical renforçant l’endosexenormativité.

Les parents de personnes intersexuées en particulier demandent un accompagnement psychologique non pathologisant, régulier et durable pour leurs enfants intersexué·es. Le manque d'information sur le soutien disponible et de ressources adéquates crée des situations de détresse, particulièrement lorsque les jeunes intersexué·es atteignent l'âge adulte et quittent les services hospitaliers. Il est donc impératif de renforcer l'accès à un soutien psychologique continu et bienveillant, afin de garantir aux jeunes intersexué·es une transition harmonieuse vers l'indépendance et le bien-être personnel.

Expériences et santé mentale des personnes intersexuées

Les expériences des personnes intersexuées sont diverses et uniques : chacun·e a son vécu propre. Néanmoins, il est important de reconnaître les vécus spécifiques aux personnes intersexuées pour leur offrir un accompagnement de qualité. De nombreuses personnes intersexuées ont subi des interventions médicales non consenties, qu’il s’agisse de chirurgies assimilables à des mutilations ou des traitements hormonaux imposés dès l’enfance. En outre, iels sont souvent l’objet de harcèlement et de discrimination en raison de l’interphobie omniprésente dans la société, ce qui engendre des traumatismes ayant des répercussions sur leur santé mentale et physique. Beaucoup de personnes intersexuées vivent dans des conditions de précarité.

Il est important de noter que l’intersexuation n’a pas d’impact direct sur l’identité de genre ou l’orientation sexuelle/romantique d’une personne. Toutefois, comme pour les personnes dyadiques, l’expérience de vie des personnes intersexuées peut influencer leur perception d’elles-mêmes, de leur genre et de leur orientation romantique et sexuelle. En effet, les personnes amenées par leur vécu à remettre en question la binarité des sexes peuvent développer une vision plus flexible et fluide de la binarité des genres et par conséquent de leur propre orientation sexuelle ou romantique. On ne remarque cependant pas de prévalence supérieure de personnes transgenres dans la population intersexuée par rapport à la population dyadique.

Des études menées en France et aux États-Unis révèlent que la majorité des personnes intersexuées sont confrontées à des problèmes de santé mentale tels que la dépression, l’anxiété, le trouble de stress post-traumatique (PTSD) et des tendances suicidaires. Cette situation accentue l’importance de créer des espaces de soutien adaptés pour les personnes intersexuées et leurs familles.

Conseils pour l’accompagnement des personnes intersexuées

L'accompagnement psychologique des personnes intersexuées et de leurs proches peut intervenir à différents moments de leur vie en fonction de leurs besoins spécifiques. Les parents d’un bébé intersexué sont souvent submergé·es par de nouvelles informations et peuvent subir des pressions de la part du corps médical pour prendre des décisions hâtives. Les enfants et jeunes intersexué·es ont besoin d’une écoute bienveillante et d’informations adaptées à leur âge, positives, respectueuses et non pathologisantes. Certain·es adultes intersexué·es découvrent tardivement leur intersexuation et nécessitent un soutien psychologique pour les aider à naviguer cette nouvelle réalité souvent déstabilisante. Dans tous les cas, l'accès à une information adaptée et non pathologisante est fondamental. Les personnes intersexuées et leurs proches doivent être orienté·es vers des ressources et des interlocuteur·ices approprié·es, comme les associations de personnes intersexuées, sans être noyé·es dans une surcharge d'informations. 

Les personnes intersexuées peuvent nécessiter un accompagnement psychologique sur divers aspects de leur vécu, notamment : 

  • les psychotraumatismes, souvent liés à des interventions médicales non consenties, particulièrement durant l'enfance, pouvant mener au développement de troubles de stress post-traumatique (PTSD). Les individu·es souffrant de PTSD sont plus susceptibles d'adopter des conduites à risque, de vivre des épisodes de dissociation, de développer des troubles anxieux et dépressifs, de rencontrer des difficultés à exprimer leur consentement, de s'isoler et de souffrir d'une faible estime de soi. Iels peuvent également éprouver des difficultés dans leurs relations amicales, familiales ou amoureuses. De même, bâtir une relation de confiance avec les professionnel·les de la santé mentale peut être un processus long et ardu pour elleux. Il est donc crucial de reconnaître le vécu de ces personnes, mais aussi de leur laisser le temps de comprendre les origines de leur traumatisme.
  • un rapport négatif au corps et à la sexualité, souvent engendré par des pratiques médicales et/ou sociales déshumanisantes. Ces expériences peuvent induire des sentiments de honte, rendre difficiles les soins corporels (hygiène, alimentation, santé) et augmenter la vulnérabilité aux agressions sexuelles. Le respect de l'intimité de la personne est alors primordial. Des stratégies d’adaptation peuvent également être proposées, notamment pour les soins d’hygiène.
  • le deuil face à la perte de leur corps d'origine suite à des interventions médicales non consenties ou à une perte de fonctionnalité dans certaines parties du corps (douleurs chroniques, perte de sensation, infertilité, …). L'accompagnement dans les différentes phases de deuil, incluant une écoute active, est nécessaire. 
  • des difficultés relationnelles, particulièrement au sein de la famille, dues à des sentiments d'isolement, de honte ou de vulnérabilité. Les relations avec les parents peuvent être particulièrement complexes lorsque ceux-ci, souvent par manque d'information et de ressources, n'ont pas pu protéger l'intégrité corporelle de leur enfant. Il est conseillé d'encourager les personnes intersexuées à préserver leur santé mentale, au détriment de relations familiales endommagées. 
  • les douleurs chroniques peuvent avoir un impact négatif sur la santé mentale des personnes intersexuées. Il convient alors d'ouvrir le dialogue sur la douleur et de les guider dans l'apprentissage de sa gestion au quotidien.

En règle générale, il est important de rappeler aux personnes intersexuées qu’elles ne sont pas responsables des mauvais traitements (médicaux ou discriminatoires) subis, de les déculpabiliser et de reconnaître leur expérience et la gravité de ce qu’iels ont subi, sans dramatiser leur vécu. 

Pour appréhender la réalité des personnes intersexuées dans toute sa complexité, il est nécessaire de s'informer au moyen de ressources non pathologisantes. Questionnez vos propres préjugés et connaissances à la lumière de l'interphobie avant de prendre en charge des personnes concernées qui pourraient avoir à lutter contre leur propre interphobie intériorisée. 

Dans toutes les situations, le respect de la vie privée des personnes intersexuées est primordial. Évitez de poser des questions indiscrètes à moins qu'elles ne soient absolument nécessaires pour votre pratique professionnelle, et adoptez une attitude d'écoute active. Il est essentiel d'écouter et de croire les personnes, même si leur parcours peut sembler complexe ou atypique.

Se former

Si vous estimez que vos connaissances sur le sujet sont insuffisantes, n'hésitez pas à faire appel à des associations intersexes pour vous former. Vous pouvez consulter la Cartographie des activités ou contacter info@pratiq.be pour obtenir plus d'informations sur les formations disponibles. De nombreuses ressources sont également accessibles sur notre site et sur le site du Collectif Intersexe Activiste, notamment le livre "La santé mentale des personnes intersexes", récemment publié aux éditions de l’Ornithorynque.

Sources

PRATIQ • 15 rue Sainte-Marie 4000 Liège • +32 4 227 17 33 • info@pratiq.be
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